Total de visualizações de página

quinta-feira, março 08, 2012



        C’est à toi, femme inconnue de mon pays de chimères, vallée fertile du Sion, hirondelle sur les mers de l’Arabie, étoile frémissante du petit ciel de ma chambre, c’est à toi que je parle quand dans les nuits cachées et immobiles tu m’apparais et m’incites à m’envoler dans ton eternel secret.

Je te vois, femme-fleur, corolles ouvertes à l’infini, en attendant que le soleil rouge et gris, te déguste et te mord comme le lion jaloux de sa femelle …
Il y a des jardins partout pleins de nuages aux yeux de roses, des pétales d’amour, des parterres de fantaisie mais tu préfères les champs désolés d’hiver et printemps où l’image des abeilles te parcoure et t’enchante, où les ombres des cèdres te protègent de la chaleur humaine ; fleur qui s’en va, aussitôt les cygnes des lacs inaperçus ferment les espoirs de tes rêves et projettent aux quatre vents tes graines de promesses. Symbole de fragilité, de pureté, serre humide d’un solitaire continent, tes racines se partagent en des millions d’êtres fleuris en oubliant parfois que les perles de pluie qui te donnent la fraîcheur des jours, seront aussi les larmes des amants que tu portes dans ton ventre parfumé.
Image stéréotypée de la force qui monte jusqu’au sommet des montagnes et commence à devenir distance d’aigle ou adieu de faucon ; puis quand la neige disparaît, tu restes encore, femme-fleur, lys de la vallée, mère des camélias, des giroflées, des chrysanthèmes. En effet, il suffit t’aimer profondément pour te sentir vivante, fraîche comme la chair des enfants ou comme l’ambre ou le muse qui chante les sentiments de l’âme et du corps. Tu es encore la belle saison, sa tiédeur, sa blonde lumière, fleur perchée sur la colline de mes vacances, tu restes pour beaucoup de monde l’idéal fragile d’un repos parfumé du brouillard du matin. Et tu ne le restera longtemps.
Je te vois aussi femme-fantôme de mes nuits d’angoisse devant les miroirs qui remplissent la route de mon avenir.
Immobile et sévère, ne sachant plus où aller, devinant mes pensées, mes désirs, mes émotions, tu es le phare sur le rocher de notre solitude.
Pourquoi tu te transformes ? Ah, je me rappelle déjà, quand tu te mouvais, tu m’emmenais à la campagne, nos chiens par la main, tous les dimanches la même récompense comme une aumône bénie aux mains de Dieux et des hommes. Nous remontions les petites routes joncées de feuilles humides et noires jetées par le vent du nord… et puis je te regardais, tes joues rouges de froid et tes yeux transparents de joie et bonheur. Nous longions les prés humides sur lesquels s’étalaient la rivière débordée. Plus de roseaux, plus de nénuphars, plus de fleurettes. Peu à peu le dégel venait sur ton visage et bientôt un ciel triste et gris s’étendait sur nos têtes comme une chanson d’automne. Ni hommes, ni bêtes ne sortaient plus ; ton coin du feu révélait la vie cachée de ta jeunesse lointaine et les minces filets de fumée que ta bouche laissait sortir de temps en temps défilaient un à un dans le long chemin où s’est déroulé ton passé. Tout semblait mort ; les saules de la rivière, la plaine, les haies, les champs. Tes mains de tendresse et travail n’étaient plus qu’un oiseau triste dans le paysage et ton corps s’est courbé jusqu’à terre et les hommes se sont moqués de toi. Puis, fatiguée d’avoir marché (la route est longue), comme une statue ou une cloche tu t’es mélangée aux formes des églises, fantôme invisible que la lumière attire… fantôme de mes histoires « il était une fois », rayon au large de la mer perdue dans la nuit. Je t’appelle encore de mon abîme et j’espère te revoir remonter l’escalier de mes pas.
Viens, les brumes du soir nous attendent, la porte de ton château est encore ouverte, ton air souriant, ton âme est la pierre construite aux murailles massives de la dignité est entouré de fossés profonds qui te défendront contre toute l’attaque de l’ennemi. Alors installe-toi par exemple, dans les salons de dance d’autrefois et attends un prince enchanté qui viendra le soir de ta passion et t’épousera comme le paysan qui se marie avec le foin de ses vergers à la fin des pluies d’Avril…
Héroïne fermée dans le mont Saint Michel, sur des cartes postales, on est toujours émerveillé quand on te trouve au bord des routes, en face de la vie, religieuse en lieu de pèlerinage, sable mouvant de toutes les mers de révolte.
Et tu ne te vends pas à la marée basse, aux ruelles tortueuses, aux pierres sculptées dans tes seins ; à la mesure que tu t’approches des mains que te recherchent et te défleurent, ta silhouette grandit et laisse distinguer les mille détails qui forme ta masse de granit ton extraordinaire beauté. Combien d’artistes ont contribué aux cours des siècles a édifier la cathédral de ta gloire, ton château de vitraux et de mystères ?!
D’autres ont voyagé à travers les nuages de ta solitude. Ils voulaient des photos, des romances, des souvenirs. Tout est facile à vingt ans ! Puis ils se remettaient en chemin sous les pommiers déjà lourds de fruits, à travers tes bras luisants de soies et velours. Et douce et monotone, ton image massive et muette est sur la place du marché, dans le bois blanc des sapins, sur les bancs des jardins, sur les trottoirs de la petite ville, sur la girouette de nos maisons d’hiver. Tu as copié des sculptures la douce nature du pays, tu as reproduit la glace que Dieu a répandue à pleines mains sur les visages des anges de tous les temps.
Les saints de pierre qui nous racontent leurs douleurs et leurs espérances anciennes, ce sont les fenêtres de tes horizons, collines boisées des vallées riantes…
Pourquoi écrire ce texte sur la femme ? Puisque j’ai décidé de le rédiger, il faut que je le fasse honnêtement pour lui donner le lieu d’honneur qu’elle mérite. Je comprends bien qu’elle est fière de son importance, de ses charmes, de ses plaisir…
Elle est le dialecte universel qu’on parle partout et par tous, seigneurs et esclaves, rois et serviteurs ; femme-guirlande de mes fêtes d’ailleurs, elle est le papillon sur les feuilles de mes boutons d’or, cigogne sans nid sur les toits des églises.
Et quand tu sors pour chercher fortune, ton panier de courage sur la route des renards, l’arc-en-ciel se répand autour de ton image, et tu prends la grandeur et la dimension du sourire d’un père noël devant la cheminée des enfants.

Tu suis l’appel des cyprès noirs accompagné par la musique des cigales cachées dans les pâles oliviers qui couvrent ton corps d’or et de dentelles.
Tu suis le chemin inconnu des hommes, voie maritime d’un naufrage d’espoir, passagère pressée de partir quelque part dans le monde, à l’heure où tous les ports sont fermés et les pierrots de tes royaumes disparaîtront dans les eaux limpides des canaux de Vénice.
J’applaudirai, comme tout le monde le devra faire, le jeu sanglant de tes misères, le murmure de tes prières, trajet infini de souffrance, de victoire, de miracle…
Protestante, juive, musulmane, croyante ou athée, ta foi mystérieuse t’a emmenée aux pages bénies des contes de fées de nos poèmes d’enfants. Je veux bien, tu sais, saluer la barrière que tu as dépassée chargé du poids de nos péchées de tous les jours, chanter l’héroïsme où tu as fondu le bronze de tes médailles, et couvrir de coquelicots la poussière des chemins frottés par tes pas.
Quand j’aurai fini mon harmonieux article tu seras encore là, sur la terrasse qui domine les montagnes et les précipices, gardant les berceaux dans lesquels dorment les torrents de nos vies, parfois marécageuses et désertes.
D’instant en instant le bruit de tes mots doux et gai parcourira le mur de nos ancres tardives et rougeâtres. Les prairies inondées qui bordent les quais de tes couleurs argentées seront les matins de ta bouche innocente au milieu du jeune blé, vert et frais.
Le tout de ton printemps sera encadré de bois et de ciel, de flammes et de chênes dorés. Sur la tête coiffée de légendes de saints et de sorcières, le bûcheron abattra le tronc centenaire de tes forêts de feu et de lave.
Comme un navire secoué par les vagues, mais qui ne sombre pas, nous savons que tu vas contre vents et marées pour arriver sur les plateaux fertiles et dans les plaines verdoyantes, pour offrir aux étoiles, des hameaux dessinés au milieu des ruisseaux où tourne la roue des moulins.
Tu as le privilège d’écouter les voix des matins bleus sur les falaises blanches de tes matelots pendant que le voyage n’arrive pas à la mer de tes soucis.
Enfin, dès l’aube au coucher, tu t’allonges par terre dans ta belle fourrure blanche toute tachée de sang, puis tes ailes de géant prennent la force de l’ours sauvage et alors, ton nom de femme vole sur l’esprit du courage, lac éternel où boivent tous les hommes.
Tu traînes la charrette de nos murmures d’amour, orchestre infinie de chœurs étouffés, tu fais la ronde infaillible de nos pas imprécis et ensuite satisfaite de ton destin tu rêves encore de chars fleuris, cortèges de bergers, trains de neige…
Ton cœur de plumage a été dévoré d’amour pendant des siècles entiers mais voilà qui descendent sur tes paupières les journées ardentes de millions d’astres perdus de charité et de gratitude…
À ce moment la pluie tombe.
De grands nuages semblent chercher dans mes feuilles le message illuminé que tu as proportionné à mes heures perdues, et aujourd’hui comme hier, je te vois, reine de notre existence, raison de toutes les choses, femme-fleur, fantôme, château, putain ou nuage, je te vois nue sur les branches de lierre au coin de l’humanité, laissée là par hasard… 

Nenhum comentário:

Postar um comentário